jeudi 8 mai 2014

Je vois, je vois...

Encore un article de feignant, excusez.


 Je n'ai pas pu poster cet article en rentrant du week-end prolongé que j'ai passé dans ma parenté du sud-ouest (quitté pour effectuer mon stage en région parisienne) ; je n'ai même pas pu profiter du pont pour rédiger cet article un peu à l'avance.
 La bonne nouvelle, c'est que je n'ai rien de prévu pour ce week-end prolongé. L'occasion donc de commettre meilleur article. Après avoir autant parlé de matière, j'enchaînerais bien sur la lumière.
Mais bon ; enchaînons sur l'introduction prétexte à cet article de feignant.





A ce qu'il paraît, la caractéristique de notre cervelle surdimensionnée, cette "intelligence" à la définition fuyante et précautionneuse (on ne voudrait pas officialiser scientifiquement un nouveau prétexte de discrimination semblable au sexe et au phénotype, n'est-ce pas), vient d'un mot latin qui signifie : "créer des liens".

Ce qui m'étonne parce que j'ai toujours cru que c'était là le sens du mot "religion", mais j'ai lâché le latin après mon bac S et je suis un peu paumée avec les lettres classiques.

Et si on applique ce vilain raisonnement qui consiste à se placer du point de vue d'un homme des cavernes caricatural et à s'interroger sur son mode de vie, on s'aperçoit que c'est vachement important, de créer des liens. Plus précisément, d'obtenir une analyse à partir de données. "Tiens, une fourrure épaisse et de longs crocs éburnéens, est-ce que je ne serais pas par hasard en présence d'un smilodon ?" ; le tout, espérons-le, à vitesse plus rapide que celle de lecture de cette phrase, sans quoi elle se résume à "Tiens, une fourrAAAAARGH".

On pourrait s'enthousiasmer de ce que cette caractéristique entraîne, nécessairement, le triomphe de la pensée scientifique. Celle-ci établit des liens entre toutes choses ; elle étanche ainsi la soif de compréhension des éponges sous nos crânes.
Ha ha.
Ha ha ha.
Ha ha ha aha ha ha ah aha ha ahahhahahahh ha ha ha ha hhhha HA HA HA HA HA §§

Que dalle, oui.
Les liens aléatoires entre événements coïncidents, ou les erreurs d'interprétations en corrélations, créés à partir d'expériences certes vécues, biaisent chaque individu. Et ce non seulement dans ses propres règles de vie mais aussi dans les conseils par lesquels il tente d'influer sur celles d'autrui.
Avez-vous déjà entendu quelqu'un vous déclarer qu'il "conduit mieux avec deux verres d'alcool" ? Ben, on n'est même pas sûr qu'il se soit déjà servi d'une voiture à jeûn. Si ça se trouve, quand il a essayé, ses mains tremblaient tellement qu'il a fini dans le fossé. Et si sa mauvaise foi l'emporte, il tentera de vous le vendre comme une vérité générale.
Avez-vous déjà vu quelqu'un embrasser une pièce, un jeton, une balle, afin de la "bénir" de sorte qu'elle lui soit favorable ? Oui mais une fois il l'a fait et il a gagné sa partie de baby-foot, alors on ne sait jamais hein. Rien à voir avec le fait que lui et son partenaire aient fait une meilleure partie que leurs adversaires parce que le niveau, la concentration, l'envie de gagner. C'est connu, la chance est un fluide doté d'une personnalité qui n'intervient que lorsqu'une personne accomplit un rituel stupide.
Avez-vous déjà eu envie de casser des objets en entendant que "les gens nés sous le signe du bélier sont fonceurs, c'est comme ça et pis c'est tout" ? Et les arguments apportés ne sont QUE des jéunamikis. Jéunamiki est du bélier et qui est fonceur. Jéunamiki était du bélier mais pas fonceur, mais un jour il a foncé parce qu'il était du bélier. Jéunamiki ne croit pas à l'astrologie, mais c'est typique des scorpions ascendant taureau.
Et si tu t'obstines à ne pas saisir la vérité supérieure du zodiaque, c'est que tu es un sceptique borné.

Si vous forcez un peu la main à un fervent de l'astrologie, il laissera peut-être tomber l'argument de la réalité supérieure pour noter que le passage du zodiaque signe le passage des saisons, et qu'un bébé de l'hiver n'a résolument pas la même enfance qu'un bébé de l'été, luminosité et hygrométrie entraînant des effets durables sur la personnalité. Et sinon, son milieu social ? Le "signe" de ses parents, qui sont aussi censés avoir des effets durables sur sa personnalité via son éducation ? Ou même, si on reste dans le fondamental, qu'il soit né par césarienne, voie basse, présentant le siège, aidé de forceps ou non ? (C'est bobo, les forceps).
Nope, zodiaque fait pas.

J'ai sur moi un charmant petit livre d'astrologie chinoise. Pas un vrai traditionnel, hein : juste un petit machin pour pig... européens curieux*. Certains passages sont juste assez hum pour faire rouler des yeux mais il y en a bien trop pour orner un seul article. Je vous offre donc ce que je considère comme le plus savoureux.



"Le Cheval de Feu


D'après la tradition chinoise, tous les 60 ans revient l'année du Cheval de Feu. 1906 et 1966 furent des années du Cheval de Feu. La prochaine est 2026.
Au cours de l'année 1965, précédant celle du Cheval de Feu, le taux d'avortement monta, de façon spectaculaire dans tout l'Extrême-Orient : aucune femme ne voulait mettre au monde un rejeton sous cette particulière influence. En effet, les Chevaux de Feu sont néfastes à leur famille, et leur naissance est censée provoquer des catastrophes dans leur entourage."

Mais c'est formidable, l'auteur nous explique avec objectivité quel sérieux les "extrême-orientaux" mettent dans le zodiaque. Je pourrais taquiner sur la politique de l'enfant unique et ses conséquences sur les interruptions de grossesse en Chine, mais celle-ci n'a été lancée qu'à partir de 1979.

"Il est difficile de vérifier ces dires ; néanmoins, j'ai l'exemple d'un homme né en 1906 - dans l'année qui suivit sa naissance, plusieurs décès endeuillèrent sa famille."

Jéunamiki est né sous le signe du Cheval de Feu.
Un homme dont la famille a connu plusieurs deuils. Sur combien de personnes nées en 1906 ? Toutes les personnes nées en 1906 sont des Chevaux de Feu, alors pourquoi des décès dans la famille d'une seule personne devraient-ils prouver quoi que ce soit ? Quel âge avaient les morts au moment de leur décès ? N'est-ce pas normal que sur un échantillon statistique composé de toutes les familles françaises dans lesquelles on fêta une naissance en 1906 on en trouve une qui a organisé plusieurs inhumations la même année ? On ne sait pas.
Roger, ton amie auteur de livres d'astrologie déclare que ta naissance est responsable des décès de tes aînés. Assume maintenant. Si tu es encore en vie. Parce que bon, tu es quand même né en 1906.

"Autre cas : celui d'une fille charmante, née en 1966, dont les parents se séparèrent de façon assez pénible quelques mois plus tard."

Je vous offre une astuce d'enfant issue d'un couple séparé. Ne me remerciez pas, c'est gratuit. Si vous apprenez un jour qu'une personne de votre connaissance est issue d'un couple séparé, n'hésitez pas un seul instant : confrontez-la et expliquez-lui que, d'une façon ou d'une autre, c'est forcément de sa faute. Notamment si cette séparation a eu lieu dans sa toute petite enfance.
Succès garanti.
Notez aussi l'usage du mot "cas". Ben oui, on fait une étude de cas, là : on cherche des personnes nées dans une année du Cheval de Feu qui ont effectivement porté malheur à toute leur famille. C'est purement scientifique.
N'oublions pas le faux compliment glissé : "une fille charmante". Ah là là, quelle fille charmante, c'est dommage qu'elle ait porté malheur à sa famille. Jocelyne, je peux te citer dans mon bouquin ? J'y dis que tu es charmante.

"Coïncidence ou reflet d'une réalité profonde ?"

Ce livre : simple chef-d'oeuvre de psychologie appliquée ou source de sagesse ancestrale ? Pas de degrés, pas de nuances, pas d'alternative.
Oui, peut-être que les parents de "cette fille charmante" se sont séparés parce qu'ils n'ont pas tenu le choc de la grossesse et de l'arrivée de Jocelyne. Oui, peut-être que la nouvelle de la naissance de Roger a tué de saisissement ses tantines Susanne, Simone et Cunégonde, qui n'espéraient plus la naissance d'un héritier mâle. Il n'y aurait donc pas coïncidence, sans que cela soit lié à l'année précise de mise bas de ces personnes !

"C'est à chacun de faire cette recherche pour lui-même, ou pour les Chevaux qu'il connaît."

L'auteur nous invite ici à la suspicion et à la délation des personnes nées en 1906 et en 1966, afin que celles-ci soient reconnues comme sources de malheur dignes d'être fustigées pour toutes les calamités qui ont pu s'abattre sur leur famille à peu près dans les environs de leur naissance. Ou de leur enfance, pour ce qu'on en sait.
C'est typiquement ce que quelqu'un a besoin de croire pour devenir une personne équilibrée, ça tombe bien.



Ce livre explique aussi aux natifs du Cheval, dont je suis, comment ils doivent être et mener leur vie. Ou plutôt, non, comment les natifs de leur signe sont et mènent naturellement leur vie et même que si tu fais pas pareil faut pas t'étonner d'être malheureux.

"J'ai un ami du Cheval, très intelligent et très apprécié dans sa profession ; cependant, ses sautes d'humeur lui sont préjudiciables et nuisent à ses contacts humains ; et lui navigue en permanence entre deux extrêmes, tantôt affirmant avec enthousiasme "Je les écraserai tous parce que c'est moi le meilleur !", tantôt se rongeant de doutes, faisant de l'auto-destruction et se persuadant avec une sombre délectation qu'il est un bon à rien - avec l'espoir secret que quelqu'un va immédiatement lui dire "mais non ! tu es vraiment le plus intelligent, comment peux-tu ne pas le croire..." alors, il repart pour un tour, ardent, fringant... Attendrissant, mais pas sécurisant du tout."

Oui, tout ces mots tiennent quasiment dans une seule phrase. Notons l'argument Jéunamiki.
Notons aussi que cette personne, si elle existe, devrait 1] ne plus jamais crier "je les écraserai tous parce que c'est moi le meilleur" ; tu peux faire ça dans l'intimité mais fais gaffe aux témoins, ton amie astrologue l'a mis dans un livre / 2] soigner son complexe de supériorité / 3] porter un T-shirt "Je suis une attention whore" afin d'être repéré de loin.

"[Le cheval] est habile de ses mains comme de son esprit, apprend tout avec une très grande facilité, assimile aisément, a de la mémoire"

Spéciale dédicace si tu es né une année du Cheval avec un syndrome de Down.

Ce livre offre même une grille de lecture simpliste des personnes qui se trouvent être nées une année du Cheval, comme c'est pratique !

"Ses méthodes de séduction :
Lui : impatient et prêt à tout pour arriver à ses fins. Tous les moyens lui seront bons, depuis le numéro de cirque jusqu'à l'enlèvement, en passant bien sûr par quelques déclarations remarquablement formulées et très séduisantes. Attention : c'est un champion de la déclaration passionnée !"

L'enlèvement comme méthode de séduction, je sais pas vous, mais ça me fait un peu culture du viol, la la la.
Ce qui est pratique c'est que vous pouvez du coup ne vous attendre à rien, puisqu'il est prêt à tout. Merci, livre, de ces renseignements précieux !

"Elle : vous considère avec une grande franchise et vous laisse voir, de la façon la plus spontanée, la plus naturelle, que vous lui plaisez. Il ne vous reste plus qu'à insister un brin..."

Excuse-moi, tu peux me tenir mon mètre à ruban pendant que je baisse ton pantalon ? Voilà... Merci, rends-le-moi... Hum hum... Tu peux remettre ton slip. On se fait un ciné un de ces quatre ?
QUOI ? Il me semble évident qu'il s'agit là de la façon la plus spontanée et naturelle de montrer son intérêt pour un homme. Ou alors c'est encore une phrase creuse et applicable à presque toutes les situations ?



Après le signe principal et ses caractéristiques définitives et aucunement discutables car écrites dans un livre, biatch, l'auteur passe à la notion de compagnon de route.

Mais qu'est-ce qu'un compagnon de route ?

"N'avez-vous pas déjà ressenti, au fond de vous, la présence subtile d'un autre"

Oui, j'ai en effet déjà participé à des activités qui impliquaient la présence d'un autre au fond de moi. Oh, attendez, je n'avais pas fini de citer la phrase ?

"N'avez-vous pas déjà ressenti, au fond de vous, la présence subtile d'un autre "moi-même", avec lequel vous vivez, tantôt en harmonie, tantôt en conflit ? Qui tantôt vous critique, tantôt vous encourage ?"

Aaaah, ma conscience dans sa forme la plus caricaturale de Jiminy Cricket. Ou l'angelot et le diablotin qui se battent sur mes épaules. Ou la voix dans ma tête qui m'ordonne de tuer des gens. Au choix.

"Le compagnon de route ou Ascendant chinois se détermine, comme dans l'astrologie occidentale, en tant compte de l'heure de la naissance.
Seule différence - mais de taille - il se calcule, traditionnellement, non pas en "heure locale" (heure et lieu de naissance) mais en heure de Pékin.
Sans vouloir formuler de jugement, cette pratique est sujette à discussion : en effet, elle a été mise au point pour des personnes nées exclusivcement en Chine ou au Vietnam ; il serait donc logique de l'adapter pour ceux qui ont vu le jour dans d'autres pays."

Non mais attendez madame, si vous commencez à remettre en cause un détail de l'astrologie dont vous faites votre beurre, ça veut dire que tout peut devenir sujet à discussion, non ?
Vous n'avez pas peur que d'infâmes petits sceptiques en profitent ?

Breeef, pour votre plus grand plaisir, je vous annonce que je suis Cheval/Coq et je vous en donne l'horoscope :

"Animal prestigieux, loyal et généreux."

Animal cauchemardesque aussi, imaginez ce putain de croisement.

"Hélas trop imbu de sa personne."

Trop. Le petit modulateur d'expression qui rend la phrase étrangement plus ouverte. Être imbu de sa personne est mal vu, l'être un peu est toujours trop. Quel humble n'ira pas trouver une occasion où il a pensé qu'il n'était pas traité tout à fait comme il me méritait sur l'instant ? N'est-ce pas déjà trop ?

"La modestie ne l'étouffera pas, l'orgueil est sa principale motivation, le poussant contre vents et marées, le maintenant au premier rang en tête du peloton, devant la masse qu'il a besoin de diriger et d'entraîner."

L'effet puits, vous connaissez ? La façon de formuler son propos de manière à prendre le moins parti possible, de sorte que chacun y lit ce qui lui convient comme on n'y voit plus rien au fond du puits. La plupart du bouquin parvient à me maintenir dans cette illusion de similitude.
Mais cette phrase est tellement à côté de la plaque que ces quelques illusions s'évanouissent.

"Le Cheval/Coq aime à se démarquer, c'est souvent un original, mais qui possède au plus haut point le sens de l'honneur et le culte de la parole donnée."

Nein, nein, nein, nein. Mince alors, je suis un fort mauvais Cheval/Coq.

"Sa générosité peut être totale et irréversible : s'il vous offre sa confiance et son amitié, rien - aucune pression, aucune catastrophe - ne pourra l'obliger à vous les reprendre."

Preuve que nein, et récemment en plus. Je suppose que l'auteur sous-estimait l'ampleur des catastrophes qui peuvent advenir dans une amitié.



Par la suite, le bouquin enchaîne sur "Le Cheval et les Cinq Eléments". Oui car il y a cinq éléments. Le Feu, l'Air, l'Eau, la Terre et le Métal. Lisons, dans le même ordre d'idées que tout à l'heure, la page du Cheval/Métal.

"Le Métal est du soir, de l'automne, du froid. Il symbolise la clarté, la pureté et la fermeté. Il sera celui qui tranche, qui coupe, son tempérament sera rigide, chaste, ses propos acérés."

C'est bien parce que le reste du bouquin explique que les Chevaux sont mous, fuyants, chauds-lapins et tournent autour du pot.

"Il oscillera entre beauté et destruction."

En revanche, ça colle bien avec le "manque de considération des sentiments d'autrui" du début. Tous les natifs du Cheval sont donc des psychopathes.

Une personne sur douze, mec.

"Conseils pour un Cheval/Métal :
Soyez détendu, moins "à cheval" sur les principes..."

Quand un outil de divination, quel qu'il soit, sacrifie son semblant de crédibilité au jeu de mot facile, je ne sais pas quel espèce d'espoir il faut garder sur son sérieux.



Le livre enchaîne ensuite avec un nuançage des signes chinois selon les signes européens. Tant de science, mes amis, tant de science. Lisons ensemble "Cheval/Capricorne".

"Ce cheval noble et sans artifices est le plus vertueux, le plus lucidement courageux, le plus persévérant."

Euh... C'est moi ou ce livre a décidé de me lécher les pompes, d'un seul coup ?
La suite promet monts et merveilles et revient même sur les défauts du Cheval énoncés partout dans le bouquins pour dire "nan, y a pu, le capricorne a tout mangé". Le Cheval/Capricorne reste toutefois nanti d'une "âme de justicier solitaire". Donc de psychopathe. Et le final :

"Il voit si loin... Il est du genre à rencontrer une gloire posthume."

Mais... Attendez, ça veut dire que je ne pourrai pas me faire rembourser ce livre de mon vivant si ça s'avère faux, parce que je dois attendre de rencontrer une gloire posthume ? Putain, l'arnaque !



La dernière partie du livre est un Yi-King abrégé. Ce qu'est le Yi-King ? Un manuel de divination. Le souci, ici, c'est qu'il est vraiment trop abrégé et tombe dans le piège du jeu de mot. C'est pourquoi je pratiquerai l'ancestral art de la divination chinoise à l'aide d'un Yi-King un peu plus consistant**.

Je fais mes tirages avec la méthodes des trois pièces, parce que personne ne m'a jamais expliqué comme on fait avec des bâtons :'(.

Yi-King ; explication à la porcine :

Alors tu vois, pile c'est 2, face c'est 3. Tu lances trois pièces.
Pile-pile-pile = 6
Pile-pile-face = 7
Pile-face-face = 8
Face-face-face = 9
6 et 8, c'est une ligne brisée, 7 et 9 c'est un trait plein. Ca se fait six fois, le premier trait est celui du bas. Et ça te fait un symbole sur les soixante-quatre existants, et ce symbole a un sens que tu dois interpréter pour répondre à ta question, tu vois ?

Et en plus tu as des interprétations complémentaires si tu as obtenu un 6 ou un 9, parce que c'est - c'est plus dur, mec, faut trois faces pareilles.



J'ai posé la question suivante au Yi-King :

"N'est-ce pas un petit peu du foutage de gueule que de tirer un Yi-King sur un blog à vocation scientifique, ne serait-ce que pour servir d'illustration à un propos sur les pseudo-sciences et la frontière fine séparant l'analyse de la superstition ?"

Le Yi-King a répondu :


Le diagnostic du Yi-King est formel : je suis une jeune imbécile.

Mais n'oublions pas que le tirage se nuance des résultats obtenus en chiffre. J'en ai un qui correspond, le voici :
Six au commencement signifie :
    Pour faire évoluer l'insensé
    il est avantageux d'imposer une discipline.
    On doit ôter les entraves.
    Continuer d'agir ainsi apporte l'humiliation.
Euh... Le Yi-King me dit de m'imposer une discipline pour Cent quatre-vingt-quatre. Mais il me dit d'ôter les entraves, donc, je présume, d'arrêter de poster le dimanche. Ou d'arrêter de faire des articles de science. Il précise que si je continue, je vais avoir l'air bête.

Je suis bien avancée. Posons une autre question :

"Yi-King, que penses-tu de Cent quatre-vingt-quatre ?"




Comment tu sais ?

Six à la troisième place signifie :
    Quand un homme porte une charge sur le dos
    et malgré cela voyage en char,
    il incite par là les voleurs à s'approcher.
    La persévérance conduit à l'humiliation.

Une explication de texte précise que dans l'ancienne Chine les pauvres portaient une charge sur le dos tandis que les nantis voyageaient en char. Un type dans un char avec une charge sur le dos, c'est donc l'archétype d'un ex-pauvre qui a réussi mais qui sent encore la fange. Cela incite les convoitises parce que tout le monde déteste les parvenus.
"Tu as ouvert un blog, conduis-toi en blogueuse" ? "Continuer à faire n'importe quoi ne mène nulle part" ? Euh, oui ? C'est d'ailleurs pour ça que j'essaye d'avoir un vrai métier à côté ?
Yi-King, est-ce que c'est une menace ?



Une dernière pour la route :

"Yi-King, comment expliques-tu que tu sois aussi rigolo bien qu'écrit il y a fort longtemps dans un tout autre but ?"



Et tout est dit. Parce que la divination a le bon goût de donner aux humains ce qu'ils veulent, du sens, des réponses, fussent-elles fausses, elle aura toujours du succès.
Mais doit-on fustiger pour autant les gens qui la pratiquent ? Ils essayent parfois d'attacher la science à leur discipline ; ceux qui ne sont pas là uniquement pour palper du blé sont réellement à la recherche de sens. Et, rien que pour ça, je crois qu'ils méritent qu'on les prenne au sérieux, qu'on leur explique calmement où - à notre avis - ils se trompent, et qu'on les remercie d'avoir participé.

Sur ce, je vous salue et je vous donne rendez-vous dimanche pour un article, euh... Plus intéressant. J'espère. Je ne garantis rien.

@now@n



* Zodiaque chinois : Cheval, de Catherine Aubier chez MA Editions.
** Yi King, Le livre des transformations, de Richard Wilheim et Etienne Perrot chez Librairie de Médicis.

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